2 avril 2022 – Mise à jour le 14 mars 2023
Une nouvelle méthode de détatouage a fait son apparition dans les salons de beauté. Attention, non seulement elle n’est pas naturelle mais en plus, elle est potentiellement dangereuse.
En Europe, 15 à 25 % des 25-34 ans sont tatoués mais 14, 4 % avouent regretter leur geste. Du coup, les méthodes de détatouage ont le vent en poupe. Mais alors là, gaffe de chez gaffe. D’aucuns essaient en ce moment de faire croire que le laser (pourtant le gold standard en matière de détatouage) est « has been » ou « dangereux ». Ben, tiens … Et pour vendre quoi, à la place ? Une méthode de détatouage dite « naturelle » et présentée, bien sûr, comme « tellement plus rapide, économique, secure … ».
Pratiquée par des non-médecins (esthéticiennes, maquilleurs, tatoueurs, etc), elle n’a en réalité rien de « green » puisqu’elle utilise un agent chimique : l’acide lactique. Les produits en question s’appellent Skinial, Tatoo2away, Rejuvi … Ces formules étaient à l’origine destinées aux médecins qui ne sont pas équipés de lasers, mais les fabricants ont fleuré le filon et finalement étendu la vente à des professionnels qui n’ont pas les compétences pour les utiliser et sont donc eux-mêmes abusés.
Une étude publiée dans le très sérieux European Journal of Dermatology et signée de plusieurs éminents spécialistes de la Société Française de Dermatologie fait le point sur les risques encourus et ils sont de taille.
« Le procédé est présenté comme une nouveauté et une alternative soft au laser, mais cette technique de détatouage chimique médical existe en réalité depuis le 19 ème siècle. Elle n’a donc rien d’un scoop et elle n’a rien de sécurisant, bien au contraire … » avertit le Dr Gérard Toubel, Ancien Président de la Société Française des Lasers en Dermatologie. Le procédé consiste à excorier la peau tatouée, puis à faire pénétrer la solution en la massant avec les doigts, quand ce n’est pas en l’injectant directement dans le derme à l’aide d’un stylo. Une croûte se forme alors, emportant avec elle les pigments dissous. Enfin, dans le meilleur des cas …
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L’étude conduite par la Société Française des Lasers en Dermatologie, entre 2019 et 2020, fait état d’un risque accru de cicatrices hypertrophiques (en volume) ou atrophiques (en creux), les pire abominations ayant été identifiées au Canada. « Ce peeling chimique est particulièrement dangereux entre les mains de non médecins qui ne maîtrisent pas la profondeur d’action du produit et peuvent, par conséquent, causer des brûlures aux effets irréversibles » indique le Dr Toubel. En prime, rien ne garantit que les tatouages soient bien estompés à l’arrivée. Le travail est déjà délicat avec un laser, alors avec un procédé qui remonte à Mathusalem, n’en parlons pas ! « Dans la plupart des tatouages, le pigment n’est pas superficiel. Il s’est déposé profondément dans le derme et l’acide lactique ne peut l’atteindre. L’opérateur est alors tenté de renouveler l’opération avec tous les risques qu’une nouvelle application peut comporter » poursuit le spécialiste. Le coût des traitements médicaux (laser à colorant pulsé, injections de corticoïdes forme retard, laser fractionné et compression avec des plaques de silicone …) pour tenter ensuite de rattraper ces très vilaines cicatrices est exorbitant et, en prime, et sans garantie de résultat.
A toutes fins utiles, on rappelle que les non-médecins ne sont PAS habilités à injecter des substances dans la peau, en dehors des pigments utilisés pour la dermopigmentation. Ceci s’apparente à une pratique illégale de la médecine (2 ans d’emprisonnement, 30.000 € d’amende). Lire aussi : Injections d’acide hyaluronique par des non-médecins : la chasse est ouverte !
Le Haut Conseil de la Santé Publique sur son site www.hcsp.fr, recommande d’ailleurs d’interdire toute utilisation de produit chimique et de réserver cet acte aux médecins avec recours exclusif au laser.
Pour les mineurs, l’acte de détatouage n’est autorisé qu’à partir de 16 ans, avec le consentement écrit d’une personne titulaire de l’autorité parentale et il convient de limiter la zone et la surface du détatouage.
Bref, ne vous laissez plus emberlificoter. Vous risquez vraiment votre peau !
Cicatrices hypertrophiques après un détatouage dit « naturel »
L’expert :
Dr Gérard Toubel
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