11 juin 2022 – Mise à jour le 19 mars 2023
On a beaucoup écrit sur les injections ratées dans les fesses de certaines influenceuses (Luna Skye, Emilie Amar, etc.) Mais que s’est-il passé exactement ? Doit-on définitivement faire une croix sur ce traitement esthétique ? Toutes les infos !
J’ai lu et entendu tellement de choses délirantes sur le sujet que j’avais envie d’interroger un spécialiste, pour décortiquer le problème et vous livrer une information vraiment juste sur ces ratés car vous êtes nombreuses, parmi les jeunes, à rêver de fesses rebondies et l’injection (malgré son coût) est souvent la première option retenue. Le Pr Michael Atlan, chef de service de Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique de l’Hôpital Tenon APHP – Sorbonne Université, à Paris, a ainsi bien voulu m’éclairer sur la nature des complications et les conditions dans lesquelles ces injections doivent être réalisées pour éviter tout problème.
La presse a souvent évoqué un phénomène infectieux. Un problème auquel peut être potentiellement confronté tout médecin au cours de son exercice. Mais selon le Pr Atlan, il n’en est rien : « Aucune infection n’a jamais été mise en évidence dans les cas rencontrés » !
Le pitch
Six femmes sur une période de 18 mois se sont plaintes 3 à 8 semaines après leur injection d’acide hyaluronique dans les fesses, de l’apparition de fièvre, de rougeurs, de zones d’induration et de nodules (petites boules) douloureux et qui semblaient être majorés par une activité physique intense et la prise de douches chaudes.
Quelle a été la réponse médicale ?
Dans un premiers temps, les médecins ont traité les effets indésirables par des corticoïdes et des antibiotiques, comme on le fait classiquement en présence de ces signes. L’acide hyaluronique se résorbant, peut-être allaient-ils spontanément régresser ? Mais non ! Face à l’échec de leurs traitements, ils n’ont donc eu d’autre solution que de réorienter leurs patientes vers des services hospitaliers rodés à la gestion des complications. Le Pr Michael Atlan explique : « En fait, nous sommes en présence d’une toute nouvelle pathologie, avec des manifestations très fluctuantes. Mais il faut éliminer d’emblée toute infection des tissus mous dont le traitement est bien codifié. Après de nombreux examens très poussés, rien de tel n’a pu été mis en évidence, malgré une fièvre ou des rougeurs impressionnantes. Dans certains cas, les signes d’inflammation se sont tassés d’eux-mêmes ou après une injection de hyaluronidase (enzyme qui dissout l’acide hyaluronique). On a alors renvoyé les patientes chez elles et à d’autres moments, ils réapparaissaient, s’exacerbaient et les patientes revenaient alors à l’hôpital. Pour quelques unes, la situation a été si compliquée qu’elle nous a conduit au bloc pour retirer l’acide hyaluronique. Nous avons injecté du sérum physiologique dans la zone traitée pour diluer le produit puis nous l’avons aspiré. Mais cela n’a pas toujours été suffisant. Il nous a parfois fallu poser des « drains », lesquels nous ont permis de réaliser deux lavages de la zone injectée par jour, pendant plusieurs jours, pour faire sortir davantage de produit ».
Parmi les patientes traitées, certaines n’ont pas encore réussi à s’en sortir : celles qui ont reçu des injections du produit dans le muscle et non sous la peau. « L’une des hypothèses avancées pour expliquer l’inflammation chronique dont elles sont victimes est la formation d’un biofilm autour de chaque amas d’acide hyaluronique, c’est-à-dire d’une matrice entourant les bactéries qui les rend très résistantes au traitement et à la dégradation normale. Mais il est malheureusement impossible de retirer chirurgicalement ce biofilm, comme on peut le faire lorsqu’il survient sur une prothèse de sein, par exemple, en enlevant l’implant » décrypte le Pr Atlan.
Comment vivent les patientes victimes de ces effets secondaires aujourd’hui ?
« La plupart s’adaptent à la situation. Pour d’autres, les épisodes inflammatoires vont et viennent mais ils se tassent tout de même au fil du temps. Les patientes n’ont plus mal, n’ont plus de fièvre mais doivent cependant faire attention à ne pas avoir une activité physique trop soutenue qui serait susceptible de relancer l’inflammation. Leur peau présente des séquelles : des taches brunes et des trous, consécutifs à la pose des drains. Nous réfléchissons actuellement au moyen de retirer l’acide hyaluronique du muscle, ce qui se fera probablement grâce à une injection de hyaluronidase, sous contrôle échographique » indique le chirurgien.
Faut-il renoncer aux injections d’acide hyaluronique dans les fesses ?
A la lecture de ces épisodes tragiques, on serait tenté de dire : « Bah, on va peut-être reporter la séance, hein ?… ». Mais le spécialiste se veut malgré tout rassurant: « L’acide hyaluronique utilisé pour l’injection des fesses et notamment le Hyacorp qui est le produit le plus répandu, est fiable. Ce genre de complications malheureuse est rarissime, moins de 0, 5 %. Il convient simplement de respecter des conditions strictes d’injection auxquelles les médecins doivent être dûment formés ». Et le laboratoire Bioscience qui commercialise le produit leader du marché d’ajouter : « Environ trois-cent médecins en France utilisent notre produit et plusieurs milliers de dans le monde. Plus de 35.000 procédures d’augmentation des fesses ont été réalisées avec Hyacorp depuis son lancement, sans qu’elles aient posé de problèmes ». En résumé, c’est de la médecine. Le risque zéro n’existe pas (cf l’affaire Linda Evangelista avec la cryolipolyse) mais il y a quand même quelques bonnes raisons de se sentir rassuré si on veut faire ces injections (ce qui n’empêche pas d’y réfléchir quand même à deux fois avant de se lancer).
Quelles sont ces « conditions strictes d’injections » à respecter pour une injection d’acide hyaluronique dans les fesses ?
Il n’est pas nécessaire de réaliser l’injection au bloc mais dans tous les cas, elle doit être pratiquée dans des conditions d’asepsie très rigoureuses (désinfection de la zone de traitement, port de gants chirurgicaux, utilisation d’un matériel stérile, etc).
- 7 jours avant l’intervention, il faut stopper la prise de tout médicament qui fluidifie le sang (aspirine, ibuprofène, etc)
- 2 jours avant : éviter l’application de cosmétiques sur la zone traitée tels que les AHA, le rétinol, etc ; tout acte d’épilation. En revanche, prendre des granules d’arnica en prévision des ecchymoses (bleus) est conseillé.
- 1 jour avant : éviter toute boisson alcoolisée
- Le jour J, juste avant l’opération, prendre une douche et ne pas appliquer de produit cosmétique sur la zone de traitement
Concernant l’acte lui-même :
« L’injection ne devrait pas poser de problème lorsque l’acide hyaluronique est injecté par un praticien formé, en quantités raisonnables, soit 10 seringues de 10 cc ou même un peu plus, par côté. Cependant injecter plus 45 seringues par côté comme cela s’est déjà vu entraîne une charge inflammatoire beaucoup trop importante et une dégradation lente du produit. Le site d’injection aussi est capital : il est recommandé au médecin d’injecter le produit en sous-cutané et non dans le muscle où l’acide hyaluronique reste plus longtemps, ce qui expliquerait la récidive des épisodes inflammatoires. Une injection sous contrôle échographique permettrait de s’en assurer » indique le Pr Atlan.
Les consignes dans l’heure qui suit l’intervention : il est recommandé d’appliquer sur la zone traitée un pack glacé et une crème à base d’arnica et de ne pas tripoter la zone injectée. Des antalgiques sont prescrits en cas de douleurs.
Pendant 3 jours : éviter de boire de l’alcool, de fumer, de réaliser une épilation ainsi tout autre acte à visée esthétique ou traitement dentaire, de s’exposer à une chaleur trop intense (exposition solaire, sauna, hammam, douches trop chaudes). La position assise pendant 2 à 3 heures d’affilée n’est pas recommandée pendant deux semaines. Il est préférable de dormir sur le ventre et de suspendre toute activité demandant un effort physique trop intense. Eviter le mouiller le pansement appliqué sur la zone traitée.
Pendant 4 à 7 jours : toujours pas d’exposition à une trop forte chaleur ni d’activités physiques trop intenses (y compris au lit !). En revanche, il est bienvenu de masser la zone traitée pendant 5 mn, 5 fois par jour pour favoriser une bonne intégration du produit.
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L’expert :
Professeur Michael Atlan
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