11 juin 2019
Les Leds pour le visage existent aujourd’hui en masques. Vous êtes nombreuses en ce moment à vous jeter sur ces accessoires au look futuriste. Mais sont-ils efficaces ? C’est ce que nous avons voulu vérifier auprès d’un dermatologue, spécialiste de ces questions (quitte à jouer peut-être les grosses rabats joie).
En fait, le problème des masques Led, c’est simplement celui des Led, dont les effets sont très discutés depuis plusieurs années, même si ces lumières sont très largement utilisées en médecine esthétique dans toutes sortes d’indications : la cicatrisation, le vieillissement cutané, l’acné, les rougeurs, les cicatrices, les vergetures, la chute de cheveux, etc. En fait, pour résumer la situation : certains praticiens en sont totalement fans (il existe même une très sérieuse Led Academy qui réunit médecins, chercheurs et ingénieurs) quand d’autres trouvent cela totalement survendu. Voilà qui nous aide …
Reste que si ces lampes ne font (pour l’instant) pas tout le bien qu’elles prétendent, le traitement délivré est sans danger aucun. Les séances sont indolores, n’entraînent aucune suite et il n’y a quasi pas de contre-indications (voir plus bas). C’est pour cela qu’on le retrouve le matériel aussi dans les instituts de beauté et maintenant, nos salles de bain.
C’EST QUOI EN FAIT, LES LEDS ?
Des lumières de basse énergie (diodes électroluminescentes) qui agissent non pas par un effet thermique comme les lasers mais par « photobiomodulation » : elles n’émettent pas de chaleur mais stimulent des récepteurs sur les cellules, qui vont agir ensuite sur des cibles, comme les mitochondries (sortes de « centrales énergétiques »), afin d’activer le métabolisme cellulaire.
Selon leurs longueurs d’ondes, elles délivrent de fines bandes de lumière issues du spectre visible et infra-rouge du soleil : bleue, violette, verte, jaune, orange, rouge ou infra-rouge.
L’EFFICACITE DES LEDS DEMONTREE SUR DES CELLULES, IN VITRO
On sait depuis longtemps que ces lumières ont une action sur un certain nombre de types cellulaires : les LED jaune et rouges ont par exemple un effet démontré sur la prolifération des kératinocytes (cellules de l’épiderme) et les fibroblastes (cellules du derme) ; la lumière verte sur les cellules endothéliales (cellules des vaisseaux sanguins) ; la bleue sur la bactérie responsable de l’acné, etc.
Mais qu’elles aient une action ne veut pas dire que cette dernière soit forcément positive.« Selon la façon dont la lumière est utilisée : longueur d’ondes, mode continu ou pulsé, puissance, durée d’irradiation, etc, on peut observer des effets diamétralement opposés », indique le Pr Thierry Passeron, du CHU de Nice. C’est bien là le problème …
Avec une même lumière rouge, il est possible de stimuler les cellules du derme pour leur faire produire plus de collagène ou au contraire ralentir cette synthèse ! Nous voilà bien…
UN MANQUE CRIANT DE PREUVES DE L’EFFICACITE DES LEDS SUR LA PEAU
C’est pourtant ce qui nous intéresse par-dessus tout de savoir si cette lumière est bénéfique ou non sur l’épiderme !
« Malheureusement à ce jour, l’efficacité des LED n’est démontrée que dans le traitement des mucites radio ou chimio-induites (les ulcérations à l’intérieur de la bouche causées par les traitements du cancer) et celui de l’acné » assène le spécialiste.
A un moment les médecins se sont dit, puisque les lumières rouges et jaunes par exemple, stimulent la prolifération des cellules de l’épiderme et du derme, dans ce cas, elles doivent certainement être efficaces dans la cicatrisation, voire même la lutte contre le vieillissement ! Et voilà comment les indications ont été posées. « Mais il ne s’agit là que d’extrapolations » indique notre expert. De fait, il y a une grosse différence entre traiter quelques cellules cutanées et une peau.
« Actuellement, la situation est la suivante : nous savons que les LED ont une efficacité au niveau cellulaire, mais nous ne sommes pas encore parvenus à définir les bons paramètres de traitement. Il y a certainement des effets intéressants, mais en l’état actuel des connaissances, rien ne permet d’affirmer que les protocoles de soin proposés fonctionnent, hormis dans les indications d’acné et de mucites. Mais nous y travaillons !» indique le Pr Passeron.
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MAIS ALORS QUID, DES MASQUES LED ?
Eh bien, c’est exactement la même chose que pour les lampes médicales. S’ils ne font pas de mal, il n’est pas prouvé du tout qu’ils agissent.
Donc, au prix où le matériel est vendu, on peut légitimement se poser la question de l’intérêt de l’acheter (mis à part le côté hautement instagrammable de la chose). Le look « fantôme de l’Opéra », c’est sûr que ça fait toujours son petit effet !
Un petit rappel sur les différentes couleurs diffusées par ces masques :
- Jaune, orange, rouge
On l’a dit, les paramètres de traitement ne sont pas du tout définis. Donc, l’efficacité sur les rides n’est pas avérée (sorry d’être aussi brutale).
- Vert. Il est utilisé sur les lésions vasculaires. Mais là encore, il n’y a que des données in vitro, pas encore in vivo.
- Bleu: là, en revanche, l’efficacité de cette lumière sur l’acné inflammatoire (comprendre, les gros boutons rouge) a clairement été démontrée. Elle ne fonctionne toutefois que sur les acnés modérées et son effet est transitoire (dès que l’on arrête le traitement, les pustules réapparaissent). Par ailleurs, attention, elle a un gros effet retors : elle aggrave les taches brunes présentes sur la peau ainsi que le masque de grossesse. Méfiance donc ! C’est sans doute pour cette raison que certaines marques de masques utilisent le rouge plutôt que la bleu. On sait que cette lumière est efficace aussi sur l’acné, mais dans une moindre mesure (mieux vaut ne rien faire que de faire du mal, c’est certain).
- Violet: il a la même action que le bleu, mais en plus délétère encore sur les taches brunes !
Attention si vous êtes sujets à l’urticaire solaire. Il n’est pas exclu que la Led puisse déclencher cette photodermatose (même si ça n’arrive que rarement …).
Par ailleurs, si une utilisation de temps à autre de ces lumières est sans danger, on ignore encore ce qu’un usage quotidien ou même régulier de ces masques peut donner. « La lumière visible, surtout lorsqu’on se rapproche du bleu, génère un stress oxydatif qui affecte les fibroblastes » indique le Pr Passeron. A consommer avec modération donc, en attendant des données plus fiables.
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