8 janvier 2022 – Mise à jour le 14 mai 2023
Le nombre des « fausses injectrices » qui recrutent sur Instagram a explosé depuis le confinement. Les chirurgiens esthétiques lancent une alerte pour mettre en garde les consommatrices et interpeller les pouvoirs publics. Tout le détail de l’information, ici.
Face à la croissance exponentielle des « fake injectors » (soit toute personne qui n’est pas médecin mais joue à l’être, incluant votre voisine de palier qui traficote dans son salon …), que l’on estime à plusieurs centaines en France et du nombre des victimes (le plus souvent des jeunes filles, de 16 à 25 ans), tous les syndicats et sociétés savantes de chirurgiens esthétiques se mobilisent pour lancer une alerte générale sur les risques majeurs encourus par ces pratiques. Une conférence de presse, organisée à leur initiative, s’est tenue à Paris, il y a quelques jours rassemblant les journalistes de la presse, radio, TV, lesquels sont en train de relayer massivement l’information qui suit.
Premier message bien clair de la part des praticiens : « le temps des poursuites est venu » ! Neuf plaintes pénales avec copies à la Direction des Fraudes et aux Agences (DGCCRF) Régionales de Santé (ARS) ont déjà été déposées contre de fausses injectrices. « Et ce n’est qu’un début !», assurent les chirurgiens.
Pour rappel, la Cour de Cassation Criminelle a déjà statué sur l’injection réalisée par un non-médecin : cette pratique relève de l’exercice illégal de médecine, une infraction prévue par l’article L.4161-1 du Code de santé publique et punie de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende.
POURQUOI L’INJECTION D’ACIDE HYALURONIQUE SAUVAGE EST-ELLE RISQUÉE ?
Une injection d’acide hyaluronique est un geste technique
Il ne requiert pas seulement un œil esthétique (ce serait bien trop simple) mais des connaissances approfondies de l’anatomie, pour injecter le produit dans le bon plan anatomique (le derme superficiel, le derme profond ou au contact contact osseux, etc). En conséquence, il est strictement réservé aux médecins. Confieriez-vous le contrôle technique de votre voiture à votre boulanger ? Non, eh bien là, c’est la même histoire. « Dans un visage, il y a des vaisseaux, des nerfs, des artères, qui communiquent avec des artères de l’œil et du cerveau. Ça peut être vraiment très dangereux » rappelle le Dr Adel Louafi.
Le risque majeur est l’embolisation par obstruction d’un vaisseau, d’une veine ou d’une artère (en gros, l’acide hyaluronique bouche ces derniers), pouvant conduire à une nécrose cutanée (= un pourrissement des tissus. La peau noircit, puis tombe littéralement) car le sang étant bloqué, l’organe peau n’est plus irrigué. Bien pire, si l’acide hyaluronique remonte jusqu’au cerveau, on court le risque d’un accident vasculaire cérébral, pouvant entraîner la mort ou s’il progresse jusqu’à l’œil, la cécité. Dans ce cas, seule l’intervention extrêmement rapide d’un médecin peut vous sauver la mise (et quoique, pas toujours).
Les médecins eux-mêmes sont, bien sûr, aussi confrontés à ces complications lors de leurs injections mais ils savent comment les gérer, c’est toute la différence. Ils ont l’antidote et peuvent prescrire les antibiotiques qui vont bien, ce qui n’est pas le cas des non-médecins.
Les zones les plus à risques sont le nez, les sillons nasogéniens (les 2 plis de chaque côté du nez). On a vu des cas d’amputations partielles des ailes du nez et des lèvres à la suite d’injections ratées et ce n’est pas joli-joli à voir. Une vie foutue à 25 ans, voilà le résultat.
Les complications peuvent survenir au moment de l’injection et jusqu’à 24 h après, et même au-delà. Ce sont des urgences absolues.
A noter : l’utilisation des stylos injecteurs, type Hyaluron Pen (lire ici : Injection des lèvres sans aiguille : attention, danger !), ont été interdits par les autorités en février 2021. Ils sont pourtant toujours en circulation alors qu’ils présentent aussi de sérieux risques.
On n’injecte pas n’importe quel produit dans la peau !
… sous peine d’encourir de très, très sérieux problèmes.
« Or ces produits de comblement sont souvent des contrefaçons achetées sur internet […]. Dans les pires des cas, il peut aussi d’agir d’huile de paraffine, de silicone, de produits de comblement non résorbables qui sont interdits en France en raison de leurs effets indésirables graves et irréversibles » explique le Dr Abdel Louafi, Président du Syndicat National de Chirurgie Plastique Reconstructrice et Esthétique. « Par ailleurs, ces derniers sont injectés avec des aiguilles souillées ayant probablement servi à plusieurs clientes et qui sont ensuite jetées dans les poubelles communes et non des collecteurs spécifiques comme les médecins en disposent, mettant en danger les éboueurs. C’est un véritable problème de santé publique ! Et lorsqu’une complication se présente, le médecin ne sait jamais quel produit a été injecté, donc difficile d’administrer l’antidote … » poursuit le spécialiste. Le praticien rappelle aussi que l’achat et l’emploi des injectables tels que l’acide hyaluronique et le Botox sont réservés aux professionnels de santé. En aucun cas, le grand public ne peut se procurer ces produits qui peuvent êtres leur être fatals et, a fortiori, les utiliser lors de Botox parties organisées dans le salon d’un appartement.
« Là, on a dû retirer chirurgicalement la partie nécrosée. Ensuite, on a suturé « ,
dixit le Dr Poignonec, chirurgien plasticien membre du comité directeur de la SOFCEP *
QUE FAIRE SI ON A ETE ABUSÉ PAR UN « FAKE INJECTOR » ?
On ne sait pas toujours à qui on a affaire. Quelque fois ces apprenties sorcières se prétendent médecins ou infirmières (mais une infirmière en France n’a pas non plus le droit d’injecter l’acide hyaluronique !). « Autour de ces femmes, souvent « russes », gravitent des réseaux presque mafieux, qui exercent des menaces, des pressions psychologiques sur les victimes pour qu’elles ne témoignent pas, quitte à les indemniser … » indique Abdel Louafi. Brrrr, ça fait froid dans le dos !
« Cependant, toute personne qui est victime d’un « fake injector » doit faire valoir ses droits et déposer plainte devant les services de police ou de gendarmerie ou par simple lettre adressée au Procureur de la République du lieu de l’infraction, en lui exposant de manière précise les faits visés ou de la même manière par l’intermédiaire d’un avocat » exhorte Maître Laetitia Fayon, Avocat à la cour.
« De même, si vous avez connaissance d’un exercice illégal de la médecine par un « fake injector » sans avoir subi de préjudice pour autant, on ne peut que vous inviter à dénoncer l’infraction aux autorités judiciaires ou à contacter un syndicat, tel que le Syndicat National de Chirurgie Plastique Reconstructrice et Esthétique, afin qu’une action puisse être engagée et surtout permettre de réprimer et prévenir le danger résultant de ces pratiques illicites » poursuit la spécialiste.
Voilà, info est relayée ! Maintenant, à vous d’être attentive et faire le bon choix.
« Et là, on a retiré la partie nécrosée puis on a procédé à une greffe »
indique le Dr Poignonec
Syndicat National de Chirurgie Plastique Reconstructrice et Esthétique (SNCPRE) : www.chirurgie-esthetique-france.fr
26, rue de Madiraa, 92400 Courbevoie
Tél : 07 67 14 73 37
Email : contact@sncpre.org
- SOFCEP: Société Française des Chirurgiens Esthétiques Plasticiens
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