16 septembre 2023
Cette expression qui n’existait pas il y a dix ans est sur toutes les lèvres, aujourd’hui. Mais la peau aime t-elle vraiment la routine ?
Il n’y a pas si longtemps, personne ne parlait de routine cosmétique. C’est un concept qui a germé dans l’esprits des marketeux et qui s’est peu à peu imposé dans les nôtres. Surtout dans ceux de la Gen Z, grosse consommatrice de cosméto depuis l’âge tendre (garçons compris). ll faut dire que pour des non-spécialistes, se repérer dans l’océan des produits proposé, c’est quasi mission impossible. Que faut-il utiliser : du rétinol ou du bakuchiol ? De la vitamine C ou de l’acide tranexamique ? De l’acide salicylique, des AHA ou des PHA ?
Perso, je n’apprécie pas trop de mot « routine », qui sous-tend répétition, automatisme, habitude, tous les jours le même régime, ce qui ne colle pas du tout avec les humeurs de la peau, lesquelles varient énormément selon le jour, la saison, l’état de santé, l’âge, les fluctuations hormonales, etc). D’autant qu’on n’a pas tous le même épiderme, le même phototype (couleur de peau). Quand on me demande quelle est la mienne, je réponds toujours que je n’en ai pas. J’ai bien quelques actifs clés et produits fétiches que j’utilise de façon récurrente parce que je les trouve magiques sur mes cellules, mais je fais surtout en fonction de ce je vois, de ce que je ressens. Plutôt que de suivre les concepts fumeux qui fleurissent sur les réseaux, skin cycling, slicking, flooding, etc, tous hyper-standardisés, apprenez plutôt à écouter votre peau. Il faut faire en fonction de ses besoins au moment T.
La routine cosmétique, la nouvelle obsession
« Rituellement, lorsque je reçois des jeunes en consultation, ils en profitent toujours à un moment où à un autre pour déverser sur ma table un sac produits, lequel peut contenir jusqu’à dix références cosmétiques et là, ils me regardent avec un air interrogatif. C’est ma routine, ça, Docteur, vous en pensez quoi ? C’est bien pour ma peau ? Souvent, je ne connais que le dixième des marques en question (rires). Alors, je leur demande « : « Vous êtes satisfait de ces produits ? Ils vous conviennent ? ». Si la réponse est « oui », alors banco, je les invite à poursuivre leur utilisation. Et si c’est non, j’essaie de prendre quelques minutes pour revoir avec eux les bases élémentaires du soin de la peau. Beaucoup de patients dépensent énormément d’argent dans des produits juste parce qu’ils en ont entendu parler. Ils ne savent pas du tout s’ils leur sont adaptés. Le résultat sur leur peau est donc très aléatoire » rapporte le Dr Naima Midoun. On ne devrait jamais donner quelque chose à sa peau sans savoir pourquoi on le fait. C’est quand même un organisme vivant, pas une chose morte ! Et si le produit ne sert à rien, comme cette satanée mode du gommage du cuir chevelu, pourquoi poursuivre ? Il y a des gestes qui paraissent anodins mais nuisent, à la longue, à l’épiderme. Vous pouvez vous créer de réels problèmes en surchargeant votre peau de choses inutiles, en l’hydratant ou en l’exfoliant trop par exemple (Lire ici : Hydrater sa peau ? Une fausse bonne idée selon le DrZein Obagi !). Think about it.
Seule routine cosmétique incontournable : l’hygiène cutanée
C’est le point de départ de toute routine s’il en est. Le soir, la peau a accumulé de la sueur, du sébum et mille saletés. Clairement, elle est crade. Il est donc impératif de la démaquiller (avec une eau micellaire, une huile ou tout autre produit désigné pour), puis de nettoyer le visage avec un pain dermatologique ou un gel moussant sans savon. Vous pouvez utiliser tous les jours le même produit s’il convient à votre peau. Là, on peut avoir ses habitudes. Ensuite, le lendemain, au réveil, un simple nettoyage à l’eau (du robinet ou thermale) suffit. « Les nettoyants ont tendance à dessécher la peau. Si on peut éviter de trop en utiliser, c’est toujours mieux » conseille le Dr Naima Midoun.
Vous avez une peau saine ou une peau pathologique ?
Voilà la vrai question à se poser ! « Pour moi, c’est le point de départ de tout. Si le patient sait répondre à cela, il a toutes les chances de faire de meilleurs choix cosmétiques » explique le Dr Naima Midoun.
Pour rappel, la peau saine, c’est la peau sans défauts. Celle qui ne pose pas de problème particulier. Et cette peau-là, elle est géniale car elle a besoin de très peu de choses : essentiellement d’une bonne hygiène cutanée. « Pour rappel, l’hydratation quotidienne ne s’impose réellement que lorsque la peau qui tiraille » indique le Dr Midoun (bah, oui !). Les crèmes concernent donc avant tout les peaux déshydratées (par le soleil, le froid, …, les traitements médicamenteux, etc.), les peaux constitutionnellement sèches, les peaux matures, les peaux atopiques, etc. Si ce n’est pas votre cas, alors vous pouvez parfaitement vous en passer parce que, figurez-vous, la nature est bien faite. La barrière cutanée, en jouant son rôle de « couvercle », préserve impec l’hydratation naturelle de la peau.
A noter que la peau grasse n’est pas obligatoirement pathologique. Si elle est confortable, elle peut très bien se passer de crème aussi. « Toutefois, beaucoup de jeunes femmes se disent gênées par son aspect luisant. Dans ce cas, je leur conseille de restreindre le nombre de couches appliquées sur le visage. C’est la base. Une crème matifiante, choisie dans une gamme pour peaux grasses, suffit amplement. Toutefois, ce produit n‘est pas magique non plus. Son efficacité est limitée et de courte durée » indique la spécialiste.
Qui dit peau grasse dit aussi souvent points noirs, mais cela ne rend pas la peau pathologique pour autant. Cette dernière n’a pas besoin de crème non plus si elle ne tire pas. Mais, on peut, dans un souci esthétique, avoir envie de déloger les mochetés, avec des actifs ou des protocoles spécifiques (AHA, acide salicylique, protocole Hydrafacial …). Il faut néanmoins savoir qu’ils dessèchent un peu la peau. Il faudra donc probablement compenser leurs effets avec une crème hydratante (à choisir dans une gamme pour peaux grasses, encore).
En revanche, si l’épiderme (ou le scalp) commence à chouiner (ça pique, ça gratte, ça chauffe, ça tire, ça bourgeonne, …), alors, c’est qu’il est malade et il est vivement recommandé de consulter un dermatologue pour un programme adapté. « La grosse erreur que font souvent les patients, c’est de croire que les cosmétiques vont sauver leur peau. NON ! Dans la pathologie, le cosmétique est un plus. Ce n’est pas LA solution. Ou alors, une réponse qui ne peut être que succinte et transitoire au problème. La solution, c’est le médicament ou le protocole médical. C’est toute la différence entre « entretenir » et « soigner » la peau » explique le Dr Midoun. Le réflexe est surtout important dans des maladies comme l’acné, qui peut laisser des cicatrices. Oubliez les patchs anti-boutons qui font fureur en ce moment sur les réseaux. C’est complètement gadget. La routine cosmétique qui va bien (là, pour le coup, l’habitude a du bon), c’est avant tout celle que le dermato vous indiquera.
La présence de rougeurs aussi doit vous alerter car ces dernières cachent probablement, même si elles sont très courantes, une rosacée, une affection cutanée chronique qui demande à prendre de bonnes habitudes de soin au plus vite.
C’est la croix et la bannière pour obtenir un rendez-vous avec un spécialiste ? Hélas, oui, on sait. La France a perdu 25 % de ses dermatos en vingt ans. Le bon réflexe ? La téléconsultation ! Dans 90 % des cas, le diagnostic à distance est parfaitement réalisable. Sinon, pensez au médecin esthétique. Il connaît aussi la peau et peut aider.
Les problèmes cutanés non pathologiques
Après, il y a des petits problèmes cutanés comme les taches et les rides, qui ne relèvent pas d’une maladie mais qui enquiquinent. Dans ce cas, une routine cosmétique spécifique peut être suivie, mais pour être sûr de taper juste, encore faut-il, faire le bon diagnostic. Donc, un conseil médical peut là aussi être bienvenu. Un masque de grossesse ou une hyperpigmentation post-inflammatoire (marques cicatricielles) notamment, requière une vraie prise en charge pour en venir à bout (Lire ici : A chaque tache brune son traitement dermato). Quant aux rides marquées, elles ne s’estomperont hélas pas, sans le recours aux injections.
Et la crème solaire, elle doit faire partie de la routine cosmétique quotidienne ?
Je vous invite à lire ces deux sujets : Protection solaire : la mise en garde des endocrinologues et Pour ou contre l’écran solaire tous les jours. En résumé, la réponse est non. Une protection solaire ne se justifie pleinement que lorsque la peau est exposée à un franc soleil, d’autant plus qu’elle est pathologique ou sort d’une intervention esthétique.
L’expert
Dr Naima Midoun
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